En lien avec l’édition du dernier dernier guide du REFFED La biodiversité sur mon campus, seront publié tout au long du mois de janvier des articles sur le sujet, ainsi que des interviews d’experts ayant participé à son écriture. Ici le témoignage de Guillaume Bagnolini, doctorant en philosophie des sciences, naturaliste et médiateur scientifique à l’Université de Montpellier.
Quel a été ton plus beau moment de nature ?
Il n’est pas facile de choisir un plus beau moment de nature. Les moments de solitude dans la nature sont, pour moi, les plus intenses. Si je tente l’expérience d’en choisir un, je dirais qu’il s’agit d’un matin en Savoie. J’étais seul, je descendais d’un refuge, pas très bien réveillé. Le brouillard commençait à se lever. Le soleil émergeait de derrière les montagnes enneigées. Tout d’un coup, une forme sombre est apparue dans le ciel, déchirant le brouillard. Elle se rapprochait, j’avais du mal à distinguer ce que c’était. Doucement, sans un bruit, j’ai vu au-dessus de moi un jeune gypaète barbu. Ce vautour énorme se déplaçait plus silencieusement qu’un moineau dans l’air du matin. Mais ce qui m’a le plus remué les tripes, c’est son regard. A cet instant précis, l’oiseau et moi nous nous sommes demandés « qui es-tu ? ». C’est l’un de mes plus beaux moments de nature.
Comment réconcilier l’Homme et la biodiversité ?
Pour moi, l’Homme et la biodiversité sont fachés sur un malentendu. La malheureuse et terrible idée que nous sommes différents. Certes, une différence de forme mais pas de fond. Au final, nous faisons partie d’une immense famille. L’Homme, ce grand dadet, essaye par tous les moyens, notamment technologiques, de sortir de son animalité. Pourtant, on le voit bien, on ne peut s’extraire de nos besoins ou pulsions, se nourrir, transpirer, faire l’amour. Nous sommes des animaux et le resterons. Le rêve fou de nous sortir de l’animalité est impossible. Et même s’il était atteignable, l’Homme, au final, ne serait plus Homme. Nous devons nous réconcilier avec la biodiversité et plus largement avec la nature. Effaçons ce malentendu et essayons de vivre ensemble, avec cette belle et si extravagante diversité.
Pourquoi protéger la biodiversité ?
Qui voudrait se séparer d’un membre de sa famille ? De son frère trop bavard ? De son grand-père trop vieux ? Est-ce moralement bon ? Si les êtres vivants sont notre famille élargie, alors nous devons protéger cette biodiversité. Il est facile de dire ça et de voir que sur le terrain, ce n’est pas le cas. La distanciation est, sans doute, un des maux les pires de l’ultra-spécialisation de notre siècle. Manger de la viande tous les jours, pas de soucis, vu qu’on ne tue pas l’animal. Rouler sur une autoroute alors qu’une magnifique zone humide a été détruite, pas de problème car ce n’est pas nous qui l’avons détruite. Nous sommes tous responsables. On ne juge la valeur d’une action que par l’acte et non par la parole. Protéger la biodiversité n’est donc pas l’affaire que des grandes ONGs mais essentiellement de nous tous à travers notre mode de vie.
Une citation autour de la biodiversité ?
« Parler du désert, ne serait-ce pas, d’abord, se taire, comme lui, et lui rendre hommage non de nos vains bavardages mais de notre silence ? » – Jacques Monod
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