On a interviewé… Sciences Po Zéro Fossile

28 mars 2017 par Cassandre Charrier Témoignages 64 visites

Dans le cadre de la Semaine étudiante du Développement Durable, qui a lieu du 1er au 7 avril dans tous les campus de France, le REFEDD et le collectif 350 France lancent une campagne d’action « Zéro Fossile » pour demander aux universités de prendre position et rompre les liens avec l’industrie fossile. Pour présenter plus concrètement ce que sont les actions « Zéro Fossile », nous sommes allés à la rencontre de 2 étudiant.e.s de Sciences Po Paris, Nicole Leonard et Maximilian Friedrich, membres de l’équipe Sciences Po Zéro Fossile. 

 

Tout d’abord, pouvez-vous vous présenter ? Qu’est ce que Sciences Po Zéro fossile ? 

Nous sommes un équipe d’étudiants qui exigent que Sciences Po coupe tous ses liens avec l’industrie fossile. Cela signifie, par exemple, que l’école doit cesser son partenariat stratégique avec Total (depuis 2011) et qu’elle refuse toutes donations des entreprises issuent de l’industrie fossile (notamment : Gazprom, Total, ENGIE, EDF). Pourquoi est-ce que nous exigeons que Sciences Po cesse ces liens avec cette industrie ? 
Selon les scientifiques, si elles sont exploitées, les réserves fossiles (pétrole, charbon, gaz) découvertes dépassent largement le budget carbone qu’il est possible d’émettre si nous souhaitons atteindre l’objectif que s’est fixé pratiquement tous les gouvernements de la planète en décembre 2015 à Paris : celui de limiter la hausse de la température mondiale “nettement en dessous de 2°C”, en se fixant un objectif plus précis de 1,5°C.

Face à cette menace, notre campagne s’inscrit dans le cadre global du “mouvement pour le désinvestissement”. Ce mouvement, lancé par l’ONG 350.org il y a 4 ans, a pour objectif de convaincre les institutions publiques (université, musée etc.) de couper les liens qu’elles entretiennent avec le secteur des énergies fossiles. Pour atteindre cet objectif, il est essentiel que ces institutions retirent leurs investissement du secteur des énergies fossiles afin d’encourager la transition vers un système énergétique durable. Par conséquent, nous pensons que Sciences Po doit assumer sa responsabilité face au changement climatique et agir de manière plus éthique.

Comment la campagne a-t-elle démarré ?

La campagne a démarré par la création d’un petit groupe d’étudiant.e.s en 2016. Parmi eux, certains étaient déjà actifs au sein du mouvement pour le désinvestissement via leurs expériences à l’étranger, notamment au Canada. Au début, un étudiant a pris contact avec 350.org, et avec son soutien, le groupe d’étudiant.e.s s’est rencontré lors d’une première réunion en avril 2016. A ce moment, nous nous étions déjà rendu compte que les structures de financement de Sciences Po étaient complexes, notamment à cause du statut particulier de l’école. Pendant l’été, nous avons réalisé nos premières recherches et avons ensuite créé une page et un groupe Facebook. A la rentrée, nous avons rédigé, avec le soutien de 350.org et Fossil Free, une pétition à faire circuler à Sciences Po, principalement sur Facebook. Début octobre, nous avons organisé une réunion pour recruter des étudiants motivés. A partir de là, 10 étudiant.e.s mobilisé.e.s assistaient aux réunions régulièrement. En montant l’équipe de recherche, nous nous somme mis à examiner et dévoiler les diverses relations entre l’industrie fossile et Sciences Po, mais il nous reste encore beaucoup de travail. Par la suite, nous avons eu l’occasion de rencontrer à deux reprises l’administration de l’école.

Pourquoi faire une campagne à SciencesPo ?


Sciences Po proclame fièrement son ambition de “former les leaders de demain”. Nous pensons donc que l’école, doit porter un message responsable et durable auprès de ses étudiants et des générations futures. D’autant plus que Sciences Po s’est fortement positionnée comme “acteur progressiste” pendant ces dernière années, en organisant par exemple des conférences “Make it work” dans le cadre de la COP21.

Soutenir l’industrie fossile, qui contribue à l’accélération du changement climatique, est donc fortement contradictoire et nous semble inconciliable avec les missions de l’école. Conformément à cette logique, Sciences Po n’accepte plus les partenariats avec l’industrie des armes et du tabac. Pourquoi alors conclure des partenariats avec l’industrie fossile, tout en reconnaissant la légitimité de son modèle économique, qui menace l’humanité ?

En fin de compte, nous pensons que Sciences Po, en tant que Grande École, tient un rôle prestigieux aussi bien en France qu’à l’étranger. Pour cette raison le désinvestissement de Sciences Po serait un acte très symbolique et inspirant pour la transition vers un système énergétique durable.

 

Où en êtes vous actuellement ? Quels sont vos projets ?

Nous sommes occupés à sensibiliser et recruter des étudiant.e.s de l’école pour propager la campagne. La plupart des étudiants les plus engagés actuellement sont en master. Il est donc nécessaire de trouver d’autres étudiant.e.s, en début de cursus, pour faire perdurer la campagne dans l’avenir. Néanmoins, nous continons nos recherches en parallèle, notamment sur le financement de l’école, ses partenariats, etc.

Ainsi nous organisons différents événements comme la projection du film Do the Mat le 9 février dernier. Cet événement a permis de réunir les étudiant.e.s et leur présenter les liens entre Sciences Po et le secteur de l’industrie fossile. Nous avons également partagé des ressources et des autocollants pendant la semaine de l’environnement organisée par l’association SciencesPo Environnement. Actuellement, nous sommes en train d’organiser un “happening” pour promouvoir la campagne, et nous lançons un processus pour faire avancer nos demandes afin que Sciences Po mette fin à ses partenariats avec Total devant le Comité des dons et les structures institutionnelles liées.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières ? Comment mobilisez-vous les étudiants ?

Nos outils en ligne sont très importants. Nous avons une pétition en ligne qui nous aide à communiquer avec tous les signataires, cela donne également de la légitimité à notre campagne. Notre page Facebook nous sert à informer le public sur l’avancée de la campagne, sur le mouvement Zéro Fossile mais également à échanger avec d’autres universités intéressées.

C’est parfois difficile de rester organisé sans une clarification stricte des rôles de chacun… mais c’est aussi un avantage ! Nous n’avons pas de hiérarchie et cela permet à chacun d’organiser une action et de la réaliser. Parfois il faut du temps pour discuter, développer et articuler nos positions sur certains sujets et trouver un consensus. Celà est lié à notre souhait de gérer la campagne de manière égalitaire et démocratique. Nous sommes toujours en train d’apprendre.

La recherche d’information est aussi un défi car il y a très peu de transparence et c’est parfois difficile de comprendre les liens entre l’industrie des énergies fossiles et l’école. Parfois ces liens sont évidents et tangibles, parfois non.

 

Un message à faire passer aux autres étudiants souhaitant lancer une campagne ?

Go for it ! Beaucoup de travail de sensibilisation a déjà été fait par les étudiant.e.s ailleurs dans le monde sur le sujet du désinvestissement, mais en France ça devient de plus en plus facile d’en parler puisque les étudiants commencent à connaître le sujet. Au début de la campagne, nous avons découvert qu’il y avait un public en attente, il faut juste un peu d’initiative et de leadership pour commencer et la campagne va se construire à fur et à mesure. Chaque campagne initiée peut en provoquer de nouvelles et engendrer un vrai mouvement.

 

Pour aller plus loin :

La page facebook de SciencesPo Zéro Fossile

La pétition de SciencesPo Zéro fossile

Le premier article du REFEDD sur la campagne Zero Fossile

Rejoignez la semaine Zero Fossile du 1er au 7 avril pour prendre part à nos actions sur les campus.

Retour sur les trois ans de la campagne de désinvestissement à l’échelle européenne :

Le site zéro fossile pour plus d’informations sur la campagne et créer la vôtre

Rejoignez le groupe Université Zéro Fossile pour vous mobiliser

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Voir en ligne : http://refedd.org/interview-science...

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